Hansel & Gretel

© Mirco Magliocca

Quatre mains, de l’encre et une voix

Les contes des frères Grimm sont cruels, celui-ci tout particulièrement. Un couple pauvre de bûcherons dans l’incapacité de nourrir sa progéniture, une sorcière perverse et anthropophage, deux enfants qu’on perd dans une forêt : il y a plus réjouissant. C’est l’histoire mythique d’un abandon. Une autre lecture est possible, pourtant. Grâce à leur courage et leur intelligence, Hänsel et Gretel affrontent leurs peurs, parviennent à s’extraire de cet univers sinistre et morbide en déployant une grande ingéniosité. C’est donc aussi symboliquement l’histoire d’une trajectoire vers la liberté, l’histoire d’une émancipation qui fait écho, au passage, à d’autres grands récits initiatiques, l’histoire d’un passage de l’ombre à la lumière.

L’actrice Nadia Fabrizio est tout à la fois ici celle qui récite, celle qui incarne et celle qui donne le tempo. Guidant le spectateur dans ces méandres silvestres, elle donne au conte une dimension inédite et l’ouvre à des interprétations multiples. C’est puissant, hypnotique même, parce que cette forêt, symbole des forces obscures, des peurs tapies au fond des âmes, des pulsions les plus noires, c’est tout ce que notre monde charrie d’injustices, de violences et de haine. L’action se déroule sous les yeux des spectateurs grâce à un dispositif poétique qui permet à l’artiste Lorenzo Mattotti de dessiner. Défilent sur écran géant des dessins tirés de son album consacré au conte de Grimm ainsi que des originaux réalisés en direct et projetés. Dessiner n’est pas illustrer ; l’encre noire évolue, de taches en traits, de circonvolutions en sillons, et suggère sans jamais fermer le sens. C’est qu’elle ne dicte pas, mais invite. C’est qu’elle ne peint pas, mais esquisse.

La scénographie signée par Dominique Pitoiset ouvre ainsi un espace singulier, hors du temps — l’atemporalité est bien l’une des caractéristiques essentielles des contes —, dans lequel le dessin, la narration et la musique s’inventent ensemble. Le peintre-illustrateur et l’actrice-récitante sont accompagnés par Nour Ayadi et Pierre-Marie Gasnier. Quatre mains sur un piano. La partition est extraite du conte théâtral en trois actes du compositeur allemand Engelbert Humperdinck (1824-1921) qui date de 1893. C’est cet Hänsel und Gretel de répertoire, régulièrement joué en Allemagne au moment des fêtes de Noël, qui est ici comme miniaturisé. Humperdinck a une plume postromantique, un langage enrichi de mélodies traditionnelles, une conception de la forme qui fait la part belle à l’usage du leitmotiv ; l’influence wagnérienne est évidente. La réduction de cet opéra pour piano à quatre mains perd donc nécessairement en couleurs et en richesses timbrales, mais gagne en lisibilité et en clarté… ce qui est intéressant lorsqu’on évolue dans des sous-bois maléfiques ! La musique est plus nettement fantasmagorique. De l’effroi à l’espoir, la voix, le dessin et le piano jouent avec les noirs et les blancs, les silences et la musique. Ce quatuor parvient à (ré)enchanter l’imaginaire des petits et des grands en revisitant l’un des chefs d’œuvre de la littérature populaire.

Camille Prost

avec

illustrations réalisées en direct par Lorenzo Mattotti

pianistes Nour Ayadi & Pierre-Marie Gasnier

récitante et costumes Nadia Fabrizio

mise en espace et scénographie Dominique Pitoiset

lumières Christophe Pitoiset

musique Hänsel et Gretel d’Engelbert Humperdinck

arrangement pour piano à 4 mains Richard Kleinmichel

texte adapté par Dominique Pitoiset & Nadia Fabrizio

régisseur général Nicolas Cointot*

régisseuses de scène Éléonore Nossent*, Caroline Roux*

régisseur plateau Emmanuel Vaugin

chef machiniste Nicolas Clidière

techniciens plateau Brice Berto*, Pierre-Louis Chanu*,

Jeanne Decertaines*, Romain Delille, Guillaume Geser*,

Adrien Lamberti, Raphael Letellier*, David Mathieu*

régisseur son David Clément

régisseurs audiovisuel Arnault Cassina*, Kévin Gumusbuken

régisseur lumière Christopher Givens

techniciens lumières Didier Brusson, David Curci,

Thibaut Garnier*, Céline Massa*

apprentie lumière Alicia Kolly*

couturière retoucheuse Maroon Bourgeois

* Personnel intermittent sur la production Hänsel et Gretel

production Opéra de Dijon

L’Opéra de Dijon remercie l’Orchestre de Paris et la Philharmonie de Paris.